
Le monoxyde et le dioxyde d’azote (appelés NOx) sont des polluants atmosphériques très nocifs pour la santé et l’environnement, par leur contribution à la formation des pluies acides, l’eutrophisation des sols ou encore la création d’ozone. Les NOx peuvent provenir de sources naturelles comme les éclairs ou l’activité volcanique mais sont essentiellement produits par les activités humaines telles les transports et l’industrie manufacturière.
Signé en décembre 1999, le protocole de Göteborg engage 27 pays européens, dont la France, à réduire de 50 % leurs émissions de NOx d’ici à 2020. Dans cette perspective, les travaux de thèse de Benjamin Farcy, menés au Coria à Rouen, sous la direction de Pascale Domingo et Luc Vervisch, prennent toute leur importance : améliorer la neutralisation des NOx réalisée par SNCR (Selective Non Catalytic Reduction) dans les incinérateurs utilisés par l’industrie du nylon et des polyamides.
Rôle clef de la simulation
Ce procédé consiste à injecter de l’ammoniac dans l’incinérateur à une température bien précise, comprise entre 1150 K et 1300 K (entre 877° et 1027°) : à des températures plus élevées, l'ammoniac brûle avec l'oxygène et crée des oxydes d'azote ; à trop basses températures, le mélange NOx et ammoniac ne réagit pas et est simplement rejeté à l’air libre. Pour que le procédé soit pleinement efficace, les gaz doivent être à une température moyenne de 1200 K (927°) avec un niveau de fluctuations précisément contrôlé. D’où l’importance du design de ces installations et le rôle clef que représentent les simulations aux grandes échelles (LES) qui ont été réalisées au Coria.
L’équipe a reproduit un incinérateur de très grande taille, représentatif de ceux utilisés par la société Solvay, comprenant l'injection de gaz variés et de sprays à plusieurs niveaux. "Ces simulations LES nous ont obligés à relever au moins deux défis. Le premier est la taille du système simulé, de l’ordre de la dizaine de mètres alors que la résolution spatiale doit être inférieure au millimètre. Le deuxième est la complexité du procédé à la fois d’un point de vue aérodynamique et physico-chimique", détaille Pascale Domingo.
Tous les moyens de GENCI mobilisés
Tous les moyens de GENCI ont été mobilisés à hauteur de 8,7 millions d’heures pour réaliser, pour la première fois au monde, deux simulations, comportant chacune 160 millions d'éléments, avec le code YALES2. Elles ont permis aux chercheurs de reproduire en détail la destruction des NOx dans l’incinérateur et de mettre au point un modèle d’ordre réduit du système complet, tournant sur une tablette numérique et utilisable par les opérateurs pour gérer l’installation.
Ces travaux ont donné lieu à deux publications très récentes dans le Chemical Engineering Science Journal et le journal de l’American Institute of Chemical Engineers (AIChe Journal), références du domaine.
Simulation à la résolution de 150 microns de la neutralisation du monoxyde et du dioxyde d'azote dans un incinérateur.
(c) Coria