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L’image fait toujours son effet… La fusée - ou plutôt le lanceur puisqu’il est destiné à déposer dans l’espace un satellite ou une sonde spatiale - s’élève « baigné » de gaz et de chaleur dans un bruit assourdissant, audible même devant un écran à des milliers de kilomètres de la base de lancement. Ce bruit fait l’objet de toutes les attentions, notamment de celle de Christophe Bogey, directeur de recherche au CNRS, et son équipe au Laboratoire de mécanique des fluides et d'acoustique (LMFA à Lyon), car il est susceptible d’endommager le lanceur mais surtout ce qu’il transporte.

Lors du décollage d'un lanceur spatial, l’allumage des moteurs génère des jets supersoniques de gaz qui interagissent avec le pas de tir, créant un environnement acoustique sévère pouvant aller jusqu’à faire vibrer la coiffe où se trouvent le satellite ou la sonde spatiale à envoyer dans l’espace (on parle de charge utile). Les amplitudes des ondes sonores produites sont, en effet, très élevées en raison de la grande vitesse des gaz éjectés et du développement d'une boucle de rétroaction aéroacoustique entre le lanceur et le pas de tir. Mieux comprendre comment se comporte cette boucle est donc nécessaire afin de réduire l'intensité des sources de bruit dans l’objectif, à terme, d’améliorer la fiabilité du lanceur.

Ada et Occigen mobilisés

Dans cette optique, et en collaboration avec le Centre national d’études spatiales (CNES), les chercheurs du LMFA ont réalisé des simulations numériques instationnaires à haute résolution de jets supersoniques impactant une paroi, en utilisant des maillages de plusieurs centaines de millions de points. Ces simulations ont été menées, chacune, sur plus de 2000 cœurs de deux des calculateurs de GENCI, Ada à l’Idris et Occigen au Cines, pour un total de 2,5 millions d’heures, en 2015.

Niveau de détail élevé

« Elles nous ont permis d'avoir accès simultanément aux champs aérodynamiques et acoustiques, pour différentes distances entre les jets et la paroi, sur des périodes longues. Les mécanismes de rétroaction aéroacoustique ont ainsi été décrits à un niveau de détail élevé, impossible à atteindre dans les travaux expérimentaux ou sur des ressources plus modestes », souligne Christophe Bogey. Car c’est bien l’avantage des grands calculateurs de GENCI : « leur nombre élevé de cœurs de calcul nous permet de faire tourner une dizaine de configurations en parallèle pour tester différents paramètres », précise-t-il.

Ces travaux se poursuivent en 2016. L’équipe cherchera notamment à se rapprocher de configurations pratiques en considérant des parois inclinées par rapport à la direction du jet et des parois trouées.

 

jet supersonique

Visualisation tridimensionnelle d'un jet rond supersonique sous-détendu impactant une paroi solide avec un angle de 90 degrés. Le développement de la turbulence dans le jet et sur la paroi après l'impact y est bien visible. Des ondes acoustiques générées au niveau de la région d'impact apparaissent également clairement dans le champ de pression représenté dans un plan transverse. © LMFA